- J’y vois rien, guide-moi.
- Pointe pas ton flingue vers moi, ducon.
- Pardon
- Y’a pas de mal
- Me crache pas la fumée dans la tronche, j’vois plus la route.
- J’vais vomir.
- Tu veux qu’on s’arrête ?
- Trop tard, désolé.
- Y’a pas de mal.
Nouveau départ sur les routes de la décadence. Promiscuité insupportable, brouhaha intolérable. Qu’il était dégradant, ce contact gras, glaireux et postillonnant avec les sapiens.
L’épave de l’Austin filait à vive allure sous la pluie glaciale. Les gouttes fouettaient les visages empourprés, envasaient le fin manteau de neige immaculée.
A l’approche des contreforts montagneux, la brume tenace s’épaissit. L’air devint cotonneux, duveté. Etouffant les bruit, emmurant les hommes.
Le soleil déclinait, le froid se faisait plus mordant. Les nez étaient humides, les lèvres gercées, les oreilles givrées. Et pourtant, la raclure bipède trouvait encore la force de palabrer. Toujours les mêmes insipides conversations.
- Franchement ce bruit c’est bizarre.
- Ouais.
- Clair.
- Tu tiens le volant, j’ramasse le pét’
- Comment ?
- Tiens le volant !
- Le volant !
- Vous l’avez pas vu ?
- Non.
- Non
- Si là, attention la banquette prend feu
- Putain.
Dégoût. Hargne, impuissance. La route sera, comme toujours, très longue.
L’auto pétaradante s’engouffra dans un cumulus accroché au sommet de la colline. Cécité.
Traversée d’un tunnel de ouate, sortie critique.
- ATTENTION DEVANT !