Ca c'est de la bagnole

(Hrp : je lance ce truc sans avoir consulté personne et j'ai pris pas mal de liberté avec vos persos - notamment greg à qui j'ai filé le volant _ donc n'hésitez pas à me dire si ça vous chiffonne et si vous trouvez que je suis un connard fini )




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Un soleil d’airain qui flirte avec le zénith. Un vent dru charriant poussière et cendre. Un couple de vautours décharnés en plein ballet aérien.

***

Le Ramdam Records s’affairait toujours autour de la carcasse sanguinolente de Ze pêqueno. Sauf Eirikur. Son shoot de cocaïne accidentel lui avait ardemment embrasé les tempes. Aussi, il récupérait, endormi sur la place du mort d’une des Austin. Son casque prussien rabattu sur sa triplette d’yeux. Le mutant rêvait sûrement de xénocide et d’holocauste bis. Ou d’une gourde d’eau. C’est vrai qu’il avait soif. Comme si on lui avait coulé du plâtre dans la bouche.

***

Cette vibration familière…était-ce Gaïa qui respirait ?...ce souffle chaud…ce crépitement de brassier…ce toussotement tuberculinique…

Eirikur s’éveilla brusquement. Ouvrit les yeux, déjà sûr de l’abomination qu’il allait découvrir. La voiture avait démarré. Et c’est Greg qui était aux commandes. Les deux mains nerveusement crispées autour du volant. Le regard torve et la bave aux lèvres.

Yeees ! T’as vu Eirkur, moi aussi je peux le conduire ce truc ! Aller on va foncer comme des oufs…accroche toi baby ! j’conduis mieux qu’la fille moi.

Greg. Cet imbécile. Greg. Déjà incapable de mettre un pied devant l’autre. D’un murmure, Eirikur implora l’aide de Gaïa. Puis s’enfonça au fond du cuir rougeâtre de son siège. Réajusta son casque.

L’Austin toussa une dernière fois avant de s’élancer dans l’uniformité poussiéreuse, libérant des nuages de fumée macadamisée. A peine avait elle atteint son rythme de croisière cahotant que l’autre poubelle sur roue arriva à sa hauteur. Tabara, au volant, n’avait pas cru bon de s’assurer de la bonne fermeture de sa portière, qui papillonnait et heurtait l’aile à chaque nid de poule. Sélène, à l'arrière, paraissait aussi dépité qu'Eirikur.

Les amplis crachèrent la voix déchaînée d’Hurra.

Les mecs ! On se fait une course ! Cu’i qui gagne il a les médailles du moche, là ! 1…euh…2…aller ! Tabara go !

Deux jours. Deux jours que la course avait débuté sur une méprise. Deux jours qu’ils n’avaient pas dormi. L’équipage de Tabara tenait encore grâce aux miasmes de cocaïne qui surnageaient encore dans l’habitable et qui se glissaient insidieusement dans leurs bronchioles à chaque inspiration. Greg tenait grâce à ses spasmes psychotiques qui le réveillaient quand les paupières se faisaient lourdes. Eirikur tenait grâce à sa haine. Tenace, décuplée, absolue.

De temps à autres, le cortège granguignolesque faisait étape quelques minutes pour remplir les réservoirs et vider les vessies. Mais il y avait toujours un pilote plus idiot que l’autre pour se glisser en douce jusqu’au siège conducteur et faire vrombir le moteur. Et les Austin repartaient dans leur ballet mécanique et poussiéreux.

La course sans ligne d’arrivée reprenait.


La mécanique était mise à rude épreuve, suppliciée par le chaos des cahots. De choc en saccade, d’écart en sortis de route, les véhicules jadis lustrés faisaient grise et brune mine. Les essieux pleuraient. Les entretoises gémissaient. Les jantes se flétrissaient. Les écrous manquaient.

Lors d’un télescopage entre les deux bolides foireux, le capot de Greg décolla. Simplement arraché à son socle comme peut l’être une pelure d’oignon. L’amas de tôle heurta la piste dans une nuage de limons roux. Et un bruit de tonnerre. Greg ne l’entendit pas. Il crût seulement bon de se justifier à Eirikur qui le fusillait de ses trois mirettes.

« Tant pis, ça sert à rien ce truc ! Et comme ça on est plus légers ! Regarde on les rattrape les mooooches ! ».

« Obsolète sapiens », caqueta le mutant.

Que des tarés… Selene laissa échapper un soupir, passive, à l’arrière de la voiture.
La course avait commencé depuis pas mal de temps. La jeune femme s’accrochait comme elle pouvait, tentant tant bien que mal d’amortir les chocs provoqués par Tabara. Elle avait vu arriver l’immense trou. Misère…

Ils allaient se manger la gueule. Voire se retourner. C’était obligatoire. Selene envoya intérieurement un message au ciel. S’ils se sortaient indemnes de ce délire, elle promettait…
Boucan, bruits métalliques, la voiture se réceptionna laborieusement. Ça roulait encore. Personne n’était mort, ou assommé, ou…
Un nouveau bruit phénoménal. Selene se retourna, à genoux sur la banquette. L’Austin de Greg et d’Eirikur roulait désormais sans capot. Alors que Hurra venait de monter sur le toit de la leur. Heureusement pour lui, ils ne s’étaient pas trouvés derrière…

Je n’ai pas peur de la route,
Faudrait voir, faut qu’on y goûte !

Soit Tabara hurlait vraiment ça à l’avant de la voiture, soit ça n’était qu’une simple imagination.
C’était un truc de dingues. Selene commençait elle-même à être transcendée par la vitesse et l’enthousiasme malheureusement communicatif des autres malades.
Songeant que le ciel ne devait pas être si sourd que ça, après tout, elle chercha dans le fouillis de la voiture. Elle finit par trouver la grande banderole de fortune, fabriquée sommairement un soir d’un calme relatif au campement, avec un bout de charbon.
La Mafieuse imita le geste précédent du rockeur, et se leva. Mais elle n’escalada pas la voiture. Elle passa elle aussi la tête par la fenêtre, puis le buste, s’asseyant enfin sur le rebord, conservant l’équilibre tant qu’elle le pouvait.

- Hurra !

Un mec normal n’aurait jamais lâché la main pour saisir ce que Selene tendait. En même temps, un mec normal aurait considéré comme suicidaire le simple fait de rester sur le toit de la voiture alors que Tabara était au volant. Certainement motivé par les drogues qui lui envahissaient le cerveau, Hurra attrapa le bout de la banderole, qui se déroula, et vola au vent. Dans le même temps, Selene se rassit en sécurité à l'intérieur de l'Austin.

Une grande inscription noire se laissait percevoir.

ENJOY YOURSELVES OR DIE !